Il n'a suffi qu'un seul regard. Un mot. Et son coeur avait été conquis. Je n'ai pas compris ce qui s'était passé. Il était venu avec les autres de Dumstrang. Je n'ai pas compris sa présence. Il semblerait qu'il soit le fils de quelqu'un. Je n'ai pas cherché à savoir. Moi qui suis pourtant est toujours prudente. J'ai baissé ma garde. Ses yeux bleu. Profond. Aussi bleu que les abysses des océans. J'avais l'impression qu'il pouvait lire en moi comme dans un livre ouvert. « Est-ce que je peux m'asseoir? » Son accent slave était nettement visible. Je regardais alors autour de moi. Plusieurs tables vides aux alentours et il voulait s'asseoir en face de moi. Je le regardais alors, suspicieuse. Je finis par accepter. Parce qu'il valait mieux ne pas énerver un slave. « Depuis quand les émissaires de Dumstrang prennent-ils le temps de faire un tour à la bibliothèque? » Je n'avais pas relevé mon visage de mon livre. « Vous voulez dire que nous n'aimons pas nous cultiver? » Je ne le regardais toujours pas, mes je pouvais sentir ses yeux sur moi. « Je n'insinue rien. Seulement, je viens ici tous les jours, et vous êtes le premier que je vois depuis l'arrivée de Dumstrang chez nous. » Et là, je me tus. Il ne répondit rien. Le silence régna à nouveau, jusqu'à ce qu'il le brise. « Demyan Alinovitch. » Je me décidais enfin à lever les yeux. Mon regard tomba sur sa main tendue. Je ne fis rien, juste ramasser mes affaires. « Analind Beauchamps. » Et je m'en allais sans en dernier regard.

Je n'ai pas compris comment nous en sommes arrivés là. Peut-être était-ce tous ces rendez-vous à la bibliothèque. Ou peut-être était-ce ton sourire, ton regard. Tu semblais différent des autres. Ou peut-être espérais-je que ce soit le cas. Tout est passé si vite, trop vite. J'avais oublié. Dans tes bras. La guerre, la haine, tous ces mots nous étaient devenus inconnus. Nous pensions avoir l’éternité devant nous, mais c’était tout autre chose qui nous attendait. La chute fut trop brutale, trop dure. Beauxbâtons venait d'être détruit. Et tout c’est effondrés. Et nous sommes tombés devant cette simple et pure vérité. C’était la guerre. Tu étais élèves de Dumstrang, moi l'une des seules survivantes de Beauxbâtons. J'ai rejoins Poudlard. Ce fut difficile. Trop difficile. Je n'ai pas pu le supporter. Je voulais oublier. Oublier nos premiers baisers, nos premières nuits, nos derniers « Je t'aime. » Parce que c'était trop douloureux. « Je ne veux pas que notre histoire s’efface comme ça. Je veux qu’elle reste dans un passé, un présent et un futur. Dey… Je ne veux pas que notre histoire s’oublie. » Un dernier regard, que mes larmes brouillaient. Je voulais garder en mémoire ton visage, tes lèvres. Un dernier baiser. « Je m’en souviendrais pour nous deux. » Ces dernières paroles, que j'oubliais à jamais. « Oubliette. »

Un cri de douleur. Encore un. Depuis 2 mois que ça continuait. Encore et encore. J'avais mal. Enchaînée. Je n'étais plus libre d'aucun de mes mouvements. Je n'en pouvais plus. « Endoloris. » Encore un. Pitié, que tout cela cesse. « Non! Arrêtez Père. » J'essayais d'ouvrir les yeux. Je n'y arrivais pas. « Laissez-moi un peu. » Cette voix froide. Elle me fit frissonner. Encore plus que ce rire glacial. « Je te la laisse alors, mon fils. » J'entendis des pas s'éloigner. Mais je n'osais pas expirer. Je retenais toujours ma respiration, attendant un énième sort. Mais il ne vint pas. Je sentis sa main sur ma joue. « Je suis désolé. » J'ouvrais enfin les yeux. Ce bleu, que je croyais avoir oublié. Pourquoi pleures-tu? Il me détachait. « Pitié… » Un dernier espoir. Je n'en pouvais plus. Il ne voulait pas. « Non, je ne peux pas… Ne me demande pas ça Line. » Ce surnom réveillait des souvenirs en moi. Ce vide, toujours le même. « S'il-te-plait… Dey… » Je n'ai pas compris pourquoi. C'est sorti tout seul. « Avada Kedavra. » Je regardais cette lumière verte foncer vers moi, comme une libération. Je fermais alors les yeux tandis qu'un loin, je croyais entendre un cri de douleur. Un dernier souffle. Enfin...

« Père, je vous en prie. Laissez-moi sortir. Je vous en prie… » Je frappais à la porte, encore et encore. Espérant que quelqu'un m'entende. Pas un bruit. Je me glissais contre, en pleur. Je me recroquevillais sur moi-même. « Laissez-moi sortir… » J'étais enfermée dans cette prison dorée qu'était ma chambre. Encore une fois. Cette fois-ci, c'était à cause de cette lettre. Et cet hibou. Je ne comprenais pas pourquoi moi. Qu'avais-je fait de mal? Ce n'était pas comme si j'avais voulu ces pouvoirs. J'aurais voulu être normale, aimée de mes parents, comme ma soeur. Mais rien de tel. Depuis ma première manifestation magique. J'ai été considérée comme un monstre, mise à l'écart, recluse à cette étage. Je ne pouvais jamais descendre. Et maintenant, je ne pouvais même plus sortir de ma chambre. J'avais mal. Terriblement. Je voulais que tout s'arrête. Je voulais retourner dans le passé et tout changer. Ne jamais naître en tant que monstre. Je voulais être normale. Mais c'était trop demandé. J'avais déjà tout. La richesse, le titre, le physique. Mais je ne pouvais demander plus. Je n'avais rien de plus. Un hululement. Je relevais mon visage. Il était toujours là. Maudit hibou, tout est de ta faute. Et pourtant, il était mon dernier espoir. Je me relevais, pris une feuille, et gribouilla quelques mots. Je l'attachais alors. « Sauve-moi… »

Je restais impassible alors que sa poigne se faisait plus puissante. J'avais mal, mais je ne disais rien. Je ne pouvais rien dire. Je ne lui en donnerais pas ce plaisir. « Tu es tellement sale… Comment peut-on avoir envie de te toucher? » Ses mots me firent mal, comme chacune de ses paroles, comme chacun de ses gestes. « Ne t'inquiète pas Rozenbach, je ne poserais jamais ma main sur toi, sauf si je dois te tuer et que je n'ai pas d'autres choix que de te toucher pour le faire. Tu me dégoûtes… » Sa réaction ne se fit pas attendre. Sa poigne autour de mon cou s'enserra encore plus. Tellement que je manquais d'air. Je crispais alors ma mâchoire. Non, je ne crierais pas. « Tu vas regretter le ton sur lequel tu me parles. » Sa voix était pleine de menace, son regard était noir et colérique. Le coup ne se fit pas attendre. Une douleur insidieuse m'envahis et je tombais. Ma vue se brouillait. Ces larmes, que j'avais tout fait pour cacher, venait de sortir. J'avais mal. Mais je me relevais. Je me tenais contre ce mur. Il s'était éloigné. « ROZENBACH! » Je n'en avais pas fini. Peu importe la douleur, j'aurais le dernier mot sur lui. « JE TE HAIS. » Son regard se fit froid, insondable. Je me ratatinais contre ce mur. Sa prestance me faisait peur. Tout en lui m'inspirait la crainte. Et il n'a fallu qu'un seul mot pour que mes jambes me lâchent. « Crèves. »

Je savais que je n'aurais pas dû sortir de ma chambre commune. Je savais que j'aurais dû rester dans mon lit, peut importe l'insomnie qui me prenait, encore et encore. Mais non, il a fallu que je sorte malgré le couvre-feu. De toute façon, respecter les règles n'avait jamais été mon fort. Mais maintenant, j'en payais le prix. J'aurais préféré me faire attraper par un préfet, ou un professeur, ou n'importe, au lieu de me retrouver dans cette salle. J'avais peur, terriblement peur. Je savais pourtant que tout n'était qu'illusion, que c'était ce putain d'épouvantard. Mais ce cauchemar semblait aussi vrai que réalité. Et j'étais là, recroquevillée sur moi-même, tandis que le brasier s'approchait de plus en plus, m'enveloppant de sa chaleur, léchant le sol de sa force. J'avais l'impression d'être replongée dans ce souvenir impérissable. J'aurais dû mourir. Mais ma magie s'était manifestée. J'avais réussi à m'en sortir sans que personne ne comprenne comment. Et depuis, je suis devenue la paria de ma famille. Les larmes coulaient sans que je puisse me retenir. Et je suppliais, encore et toujours, que quelqu'un vienne me sauver. Mais je savais que personne ne viendrait. Soudain, le feu disparut. Je pus enfin respirer. Sauf que la pression avait été telle que je m'écroulais. Le regard vague, je ne vis que ses yeux verts. Je n'entendais pas ce qu'il disait. Tout ce que je savais, c'était qu'il était là, que j'étais dans ses bras. Et je fermais les yeux. Enfin...