✤  it's so much darker when a light goes out than it would have been if it had never shone.
(Andromeda, 14 ans)
Le feu, destructeur, mortel. Elle l'avait vu emporter ses parents, tandis qu'elle luttait pour échapper à ces moldus fous, si terrorisés par ce qu'ils appelaient le diable, qu'ils n'hésitaient pas à brûler vif quiconque ils suspectaient de sorcellerie – souvent à tord. Ses parents, pris par surprise, en avaient fait les frais et n'y avaient pas survécu. Quelque part, elle se demandait encore ce qui lui avait donné la force de s'enfuir face à ce spectacle horrifique.
Le feu lui avait tout pris. Elle, si attachée à ses proches qui représentaient tout à ses yeux, avait vécu une enfance idyllique privilégiée grâce au statut social élevé de sa famille. Elle était prédestinée à hériter du domaine familial, à se marier à un bon parti, et à travailler dans une grande entreprise magique bulgare, sans doute. Mais elle venait de réaliser que toute chose pouvait être arrachée en un instant, et que cela faisait trop mal, bien trop mal, pour qu'elle envisage une vie si merveilleuse qu'il y aurait tant qu'elle pourrait perdre. Cette douleur insidieuse la rongeait, la tuait à petit feu. Elle avait été recueillie par une tante, mais sa gentillesse et sa prévoyance ne remplaçaient pas la famille qu'elle avait perdu et qui lui manquait terriblement. Elle était brisée, et ne voyait aucun moyen de sortir de cet état de tristesse permanente sans être effrayée par chaque nouveau pas qu'elle ferait pour continuer à avancer malgré tout. Elle ne voulait pas avoir peur, ne voulait plus avoir peur. Mais elle était encore trop humaine pour pouvoir un jour cesser de se sentir ainsi.

✤ a badly broken heart never cries again.
(Andromeda, 14 ans)
« Sa voix me donne des frissons ». Andromeda tourna négligemment la tête vers l'inconnue qui venait de parler, ne quittant pas des yeux la directrice, si fière et si imposante, debout sur l'estrade. En train de discourir, à l'attention des premières années, sur les valeurs dont pouvait se féliciter Durmstrang, elle dégageait une aura de confiance en elle qui saisissait Andromeda. Elle qui faisait, depuis deux mois, pâle figure d'être humain, ne pouvait qu'être impressionnée par la puissance qui émanait de cette femme. Elle ne semblait même pas forcer cela, ni même chercher à être remarquée, mais sa manière d'être, son ton et ses mots, tout lui conférait une domination absolue sur l'assemblée silencieuse. Andromeda aurait dit qu'elle ne se souciait de rien mais était maître de tout. Si elle lui semblait tout de même un peu extrémiste dans la nécessité qu'elle trouvait à prouver la supériorité de Durmstrang face aux autres écoles, Andromeda ne pouvait s'empêcher de boire ses paroles. Elle aurait tout donné pour pouvoir se sentir sûre d'elle de cette manière. Ces derniers mois, elle avait en quelque sorte sombré dans la solitude, sans même le vouloir. Elle ne se sentait juste plus capable de rester en compagnie d'autres personnes dont les sujets de conversations lui paraîtraient odieusement futiles face à ce qu'elle venait de vivre. Le silence et le calme lui suffisaient alors, et elle n'aspirait qu'à s'adonner à des activités du quotidien qui lui faisaient du bien, sans jamais réellement la rendre heureuse pour autant. A la fois n'imaginait-elle pas pouvoir être heureuse, autant qu'elle ne le voulait pas. Désormais, elle était constamment sur la défensive, s'effrayait du moindre bruit, avait du mal à s'endormir. Elle voulait juste que cette agonie se termine et qu'elle puisse se sentir existante à nouveau ; mais ne jamais plus aspirer au bonheur à travers les autres.
« Elle semble... » « Elle semble si forte », coupa Andromeda d'une voix empreinte d'une ferveur certaine. Freya Romanov n'avait peut-être pas un air émerveillé sur le visage, pas plus qu'elle ne respirait la gaieté ou la joie de vivre, mais elle avait l'air satisfaite. Et tellement forte. Sans doute était-ce tout ce à quoi Andromeda pouvait aspirer désormais.

✤  all cruelty springs from weakness.
(Andromeda, 17 ans)
Le feu, à nouveau. Vengeur et mortel. Le sien, cette fois.
Un rictus de rage sur les lèvres, elle enfonce la pointe de son poignard sous le menton du moldu, l'obligeant à lui faire face. « On ne joue pas avec le feu » scande-t-elle à plusieurs reprises, tandis que sa lame se balade sur la jugulaire du pauvre homme. Sa femme, ses enfants, et même le reste de leur famille proche, tous sont enchaînés à ses côtés, sans fuite possible. Il y a trop longtemps qu'elle prépare sa vengeance pour la voir filer entre ses doigts.

Le jour de ses seize ans, elle avait confié ce qui était arrivé à sa famille à Freya Romanov. Celle-ci s'était curieusement intéressée à elle, alors qu'elle n'avait alors que quinze ans, au milieu d'un dîner ne rassemblant que des élèves issus de grandes familles sorcières. Andromeda y avait été conviée mais avait hésité à s'y rendre ; cela faisait déjà plus d'un an que ses parents étaient décédés, mais elle ne s'en était toujours pas remise. Alors, voir de jeunes héritiers se pavaner devant les luxes que pouvait offrir une famille issue du beau monde, ne lui faisait que plus réaliser que ce qui lui restait encore n'avait plus aucune saveur à son goût. Mais elle s'était forcée à venir, ayant conscience qu'elle ne pourrait rester recluse toute sa vie, et qu'elle pouvait bien, à défaut de se sentir à sa place, faire semblant d'apprécier. Elle était devenue maître dans l'art de la dissimulation de ses sentiments, bien obligée de recourir au mensonge face à la curiosité malsaine de certaines filles de son dortoir. Alors, elle mentait ou omettait certaines choses, par nécessité.
Lorsque la directrice s'était approchée d'elle, des frissons glacés lui avaient parcouru le dos, et elle s'était figée. Cette femme lui inspirait encore plus de respect que l'année passée, mais elle avait également eu le temps de réaliser qu'elle était dure et même parfois cruelle, et n'était donc pas le moins du monde rassurée en la voyant venir vers elle. Mais, à son grand étonnement, elle s'était montrée très courtoise et compréhensive, s'intéressant aux raisons qui la poussaient à se trouver en marge du reste des élèves et à ne pas sembler ravie d'être là. Andromeda avait roulé des yeux affolés, de peur qu'on la punisse de ne pas honorer son rang, mais cela n'avait pas du tout était le cas. Par la suite, elle s'était par plusieurs fois demandée ce qui avait poussé la directrice à venir lui parler, et ce qui la motivait à l'inviter parfois dans son bureau, unique pour... discuter. Toujours était-il qu'après un moment de gêne, Andromeda avait fini par dérouler toute l'histoire et avouer à propos le traumatisme qu'avait constitué la mort de ses parents. A cet instant, elle n'avait aucune idée que Freya Romanov avait eu exactement ce qu'elle voulait ; qu'elle avait parié juste en sentant qu'il y avait quelque chose à tirer de cette jeune fille silencieuse et brisée : une tristesse si grande qu'elle pouvait l'exploiter à souhait pour façonner Andromeda qui la respectait trop pour remettre en doute ses paroles. Alors, petit à petit, les mois passant, elle avait réfléchi aux mots de la directrice concernant ses parents, « ce ne serait que faiblesse sans fin de laisser un tel acte impuni », et l'idée avait germé dans sa tête, que peut-être, se venger l'aiderait à soulager sa peine. Alors que débutait sa troisième année à Durmstrang, cette vengeance était devenue son obsession. A chaques vacances, elle se rendait dans le quartier de son ancien manoir, et passait des heures à observer les faits et gestes et les habitudes du couple qui avait assassiné de sang froid ses parents. Elle mettait des noms sur des visages, cherchait des renseignements sur leur famille proche, et notait les résultats de toutes ses recherches sur un petit journal d'ébène qu'elle gardait précieusement sur elle. De l'extérieur, elle aurait aisément pu passer pour une dérangée mentale, mais pour elle, cela n'était qu'un moyen de s'assurer que lorsqu'elle passerait à l'acte, tout serait calculé et mesuré si précisément qu'elle n'aurait aucune chance d'échouer. Et qu'elle aurait enfin sa vengeance.
A la fin de la troisième année, elle fut à la grande surprise de ses camarades, répartie dans la Marche de l'Est. Elle, si discrète, avait du mal à s'imposer comme une future tueuse sans pitié. Pourtant, il était palpable depuis un an et demi qu'elle avait changé. Elle se montrait parfois antipathique envers ceux qu'elle n'appréciait pas, s'exaspérait des petites histoires sans intérêt de ses camarades, et n'hésitait pas à riposter froidement lorsque quelqu'un lui parlait comme si elle était un être inférieur. Petit à petit, elle avait pris conscience qu'en essayant d'être heureuse et en se montrant gentille et attentionnée pour y arriver, elle ne pourrait qu'être blessée et trahie. Mais qu'être en quête du bonheur absolu n'était pas la seule manière de se satisfaire de sa vie. Freya Romanov avait rehaussé ses valeurs, lui avait inculqué l'importance de la pureté du sang – bien qu'elle la possédait déjà de par son éducation, mais se montrait désormais plus intraitable que jamais à cet égard –, mais aussi la supériorité de Durmstrang et toujours la même nécessité de le prouver au monde sorcier, en imposant au monde décadent une ligne de conduite stricte. S'il avait été possible de percer ses sentiments et ses pensées, cela aurait laissé entrevoir une vanité en pleine expansion. Mais en réalité, cela se rapprochait plus d'un orgueil naissant, car cette importance qu'elle se donnait était justifiée. Elle possédait une digne ascendance, des capacités de travail monstres, une motivation sans pareille, et surtout, une once de respect de la part de la Romanov. Andromeda ne put alors que ressentir de la fierté en intégrant cette marche, en tirant ainsi la preuve qu'elle avait réussi à dépasser la mort de ses parents en se concentrant sur d'autres objectifs qui la tenaient à cœur qui ne faisaient plus d'elle une petite fille perdue sans avenir, mais aussi en ressentant la satisfaction de la directrice. Tout avait fonctionné exactement de la manière que cette dernière avait prévue. Elle avait créé son lieutenant le plus loyal.

Elle sourit cruellement lorsque la femme hurle en voyant le sang jaillir de la carotide de son mari. Il n'est pas mort, surtout pas, pas tout de suite. Sa tête retombe pantelante sur sa poitrine, tandis qu'il se vide lentement de son sang en gémissant de douleur. Non, Andromeda ne manie pas son poignard par hasard. Elle sait exactement où couper pour que le plaisir dure plus longtemps, et qu'il ne s'achève que lorsqu'elle l'aura décidé. « Suivant ? » demande-t-elle gaiement en faisant tournoyer la lame dans ses mains. Elle accomplit tout cela uniquement pour se venger, mais elle doit bien avouer qu'à son grand étonnement, elle s'amuse comme jamais. Cette sensation de domination sur ces moldus pétrifiés l'emplit d'une intense satisfaction. « Aucun volontaire ? ». Devant l'absence de réactions, elle feint un instant un air déçu, puis retrouve un sourire carnassier. Un par un, dans un ordre strictement pré-établi, elle lacère différentes parties de leur corps, une fois, parfois deux juste parce qu'elle en a envie, et transforme ces hommes et ces femmes en une assemblée larmoyante devant sa toute puissance. Elle se sent si vivante à cette instant. Finalement, sans doute s'était-elle emportée lorsqu'elle s'était promis qu'elle n'aspirerait plus jamais au bonheur à travers les autres. Ces moldus lui apporte un semblant de bonheur passager indéniable. Peut-être a-t-elle toujours besoin des autres. Pour les dominer.
Plusieurs heures durant, elle continue son manège. Coupe, lacère, griffe toujours plus profondément. Lorsqu'elle sent que ses prisonniers sont à bout de force, elle s'arrête presque avec regret. Il ne faudrait pas qu'ils ratent le bouquet final qu'elle leur a préparé. Alors, soigneusement, elle répand sur leur peau une substance hautement inflammable, évitant précautionneusement leurs vêtements. Elle veut qu'ils brûlent, eux. Puis elle les lient entre eux en répandant une coulée de liquide sur le sol, entre les grilles qui les retiennent.
Enfin, elle attrape la torche éclairant la cave de son ancien manoir – désormais désert, mais toujours sa propriété – et se place à l'entrée. D'un sourire éclatant, elle leur adresse une dernière phrase, à eux, ceux qui l'ont finalement aidé à réaliser quelque chose d'important. « N'importe qui ne peut se permettre de jouer avec le feu ».
Et, d'un geste presque religieux, elle abaisse la torche et le sol s'enflamme. Des hurlements s'élèvent, et leurs échos raisonnent comme des milliers d'âmes torturées en quête d'un oubli impossible. Andromeda leur jette un ultime regard de pure haine, puis se détourne à jamais. D'eux, mais aussi de sa vengeance désormais accomplie.
Alors qu'elle disparaît dans l'allée, son manoir, sa maison d'enfance, sa vie passée commence à s'effondrer sous les flammes rougeoyantes.

✤ someone who lives fully is prepared to die at any time.
(Andromeda, 30 ans)
Jamais elle n'aurait pu prévoir ce que serait sa vie. Jamais elle n'aurait imaginé perdre ses parents, rejoindre la Marche de l'Est, trouver en Freya Romanov l'inspiration d'une nouvelle vision d'elle-même, être nommée commandante des Eurus de feu, et tenir un rôle central dans une telle guerre. Aurait-elle pu concevoir un tel parcours, que cela lui aurait semblé invraisemblable de finir ainsi, sous les sorts de son ennemi juré, de son opposé parfait, de l'autre côté du champ de bataille.
Et pourtant, elle voyait bien que son poignet commençait à trembler, que les jets de lumière jaillissant de la baguette de l'homme se faisaient de plus en plus proches d'elle, et qu'elle devait lutter pour rester debout, immobile et vaillante, devant lui. Malgré toute la rage et le courage dont elle faisait encore preuve, elle qui n'avait plus jamais rien abandonné depuis qu'elle avait trouvé sa place, il lui restait un semblant de lucidité pour réaliser que c'était la fin.
Elle avait l'impression de se tenir là depuis des semaines, luttant sans répit pour arracher un cri de douleur à Ezekiel, pour le voir s'affaisser sous ses sortilèges, et remporter un duel des plus symboliques qui dévasterait littéralement le camp adverse. Ezekiel était un héros, et elle n'avait eu de cesse durant toute la guerre de le faire tomber de son piédestal.
Et pourtant, elle qui n'avait plus eu aucune limite dans l'exercice de ses convictions, dans ses combats et ses tortures, mais qui avait également survécu à tellement pire, allait bientôt s'effondrer.
Ce n'était plus qu'une question de minutes.
Une poignée de secondes pendant lesquelles elle ne pouvait s'empêcher de penser qu'elle ne regrettait pas le moins du monde ce qui l'avait mené là. A défaut d'avoir suivi ses plans tous tracés d'avenir, elle avait vécu comme jamais, profitant de tout et ne tenant réellement compte de rien. Elle avait l'impression d'avoir vécu mille vies en seulement une quinzaine d'années, et cela n'avait été rendu possible que par Freya Romanov. Elle lui avait montré un chemin différent, mais si exaltant ; singulier, sans aucun doute, mais qui lui avait permis de se débarrasser de ses démons, et qu'elle avait finit par faire sien.
Plus que quelques secondes.
Mais jamais elle n'accepterait d'abandonner. Elle n'était pas qu'une créature cruelle et diabolique. Elle avait des convictions profondes, et ces dernières l'avaient menée ici, usant certes de moyens toujours plus sanguinaires pour y parvenir. Mais jamais elle n'abandonnerait ses convictions, pas même en échange de sa vie. Jeune, elle était terrifiée à l'idée de la mort. Mais elle l'avait tellement côtoyé ces dernières années qu'elle ne lui faisait plus peur.
Alors qu'un souffle glacial et meurtrissant l'atteignait enfin, elle sentit sa poitrine se soulever et l'air stopper sa course vers ses poumons. Paralysée, elle réalisa à peine qu'elle s'envolait vers l'arrière, sa nuque se pliant vers l'arrière comme si elle eut été un pantin désarticulé. Lorsqu'elle retomba sur le sol dans un bruit lourd, son visage éteint vint frapper violemment sa poitrine, puis sa tête bascula vers le côté. Ses yeux vides ne reflétaient plus aucun signe de vie, mais restaient toujours aussi indéchiffrables. La peur n'avait pas sa place sur ses traits, à croire qu'elle se fut simplement endormie pour toujours.
Et pourtant, même dans la mort, son index droit aux phalanges brisés pointait invariablement en direction de Durmstrang.
Jusqu'au bout.

✤ reason without emotion is a mask for cruelty
(Viola, 13-19 ans)
Viola venait d'avoir treize ans lorsque les premiers souvenirs lui revinrent en mémoire. Dans un premier temps, elle s'était sentie confuse, n'avait pas compris d'où venait cette Andromeda dont la vie passée avait envahie sa tête, puis elle avait fini par remettre les événements à leur place et à réaliser ce que ces flashs révélaient vraiment. En se montrant observatrice, elle avait bien vite compris qu'elle n'était pas la seule à subir l'invasion d'un double, d'une personne antérieure. A l'exception que contrairement à ceux qu'elle était amenée à croiser, elle semblait le vivre plutôt bien. Même très bien.
Viola n'avait jamais été comme Andromeda. Elle n'avait subi aucun traumatisme à la naissance – autant qu'une génitrice harpie inconnue puisse ne pas constituer un traumatisme –, était issue d'une famille aisée mais pas particulièrement reconnue dans la haute société, son père était toujours vivant, et sa belle-mère également. En soi, elle n'avait jamais vécu le moindre événement pouvant provoquer une cassure si profonde que cela l'aurait poussée à changer du tout au tout pour s'éloigner des blessures dont elle aurait pu souffrir. Viola n'avait jamais eu besoin de souffrir pour se montrer avide de pouvoir et manipulatrice. Elle faisait réellement partie du nombre restreint de personnes mauvaises par nature, agissant ainsi sans raison.
Ce fut pour cela que dès lors qu'elle eut pris conscience de la présence d'Andromeda dans sa tête, de cette femme qui avait un jour été si puissante alors qu'elle était partie de si bas, elle s'était jurée de lui faire honneur. Elle la respectait, en quelque sorte. Après tout, son âme ne s'était pas matérialisée en elle par hasard. Il devait bien y avoir quelque chose à accomplir, quelque chose à corriger. Cette fois, Viola reprendrait le flambeau et terminerait ce qui n'avait pu être achevé 400 ans plus tôt.
Cette idée avait mûri avec la jeune femme, qui avait ensuite commencé sa scolarité à Poudlard, l'école même qu'Andromeda ne cessait de maudire à l'intérieur de son esprit. Dans ces conditions, elle était hantée jour et nuit par l'idée que, même si Poudlard était son école, à l'époque à laquelle elle vivait, sa véritable allégeance allait à Durmstrang et à sa défunte directrice. Dès lors que Viola s'était laissée tentée par la vision de pure puissance que lui avait offerte Andromeda, cette dernière avait gagné une emprise totale sur la serpentarde. Cela cumulé à l'esprit naturellement malsain et au regard glacial de Viola, l'aura de pure dangerosité qui émanait d'elle n'avait pas tardé à se disperser à travers Poudlard. Encore une fois, une différence singulière la séparait d'Andromeda : Viola n'avait jamais été invisible, et elle n'avait jamais tenté de le paraître. Rabaisser les autres en public en imposant sa supériorité était clairement l'une de ses activités favorites.

✤ true monsters are not those lurking under the bed, but the ones sleeping in it
(Viola, 20 ans)
Echo était sans conteste la souffre-douleur que Viola préférait. Elle lui menait une vie impossible, et pour cause ; elle était purement et simplement folle de rage que Garrett l'ait abandonnée pour une fille aussi insignifiante que la Poufsouffle. Mais au delà de la haine pure qu'elle ressentait à l'égard de la brune, Viola s'amusait toujours de voir à quel point la petite Poufsouffle avait besoin de peu pour filer pleurer dans les jupes d'Emory. Ce moment était sans aucun doute celui qu'elle préférait, au-delà même des tortures qu'elle faisait subir à la jeune femme – bien que son obsession pour la domination la faisait savourer ce genre de situations. Elle prenait un plaisir incommensurable à voir la fille déguerpir, une lueur de terreur dans son regard incertain, et à savoir que dans la journée, elle aurait droit à des représailles. Ou plutôt, à une tentative de représailles. Il n'y avait pas grand chose qu'Emory pouvait bien lui faire pour venger Echo ; il était trop intègre pour s'abaisser aux ruses et aux techniques de son ennemie, bien qu'elle ait souvent eu l'impression qu'il se faisait violence pour ne pas en user. Aux yeux de tous, il ne pouvait rien contre elle ; son père était le ministre de la Magie, ce qui faisait d'elle une personne avec laquelle il valait mieux ne pas s'attirer d'ennuis publics, au risque de faire ses adieux au château pour un long moment. Mais même lorsqu'il cherchait à l'atteindre plus personnellement, plus profondément, à lui rappeler qu'elle n'avait pas été de taille et ne le serait jamais, que personne ne l'appréciait vraiment pour sa personne, ce n'était jamais assez pour la blesser. Il ne pouvait rien contre elle, sinon alimenter sa rage contre lui, qui la consumait littéralement. Elle avait toujours un pas d'avance sur eux, ceux ligués dans le côté du bien, parce qu'elle ne connaissait aucune limite. Elle n'avait rien à perdre ni à gagner sur le chemin qui la menait à son unique objectif : ressusciter Freya Romanov. Alors qu'eux, ils avaient une éthique, un sens du combat, et cherchaient à l'atteindre comme l'on atteindrait chaque être humain : par les sentiments et les émotions. Mais Viola n'était qu'un puits sans fond, et plus ses ennemis cherchaient désespérément à en trouver la fin, plus ils s'y enfonçaient.

Mais elle faisait, ces derniers temps, face à la dure réalité de leader aux grandes ambitions. Lier le Pouvoir des Cinq aux Ames Vengeresses requérait une volonté et une attention de tous les instants ; bien qu'elle n'ait affaire, à ses côtés, qu'à des élèves recrutés scrupuleusement et motivés par le retour de l'ordre ancien et la somme considérable de pouvoirs qu'ils pourraient en retirer, lier une organisation enfermée dans un milieu scolaire à une secte encore plus dangereuse, extérieure au château, nécessitait de mener tous les fronts de côtés, en veillant à ce que l'affaire prenne son importance sans s'ébruiter. Heureusement, elle avait Dünya à ses côtés, une des rares personnes en lesquelles elle avait un minimum confiance. Le lien de leurs âmes passées les plaçaient dans la poursuite du même objectif, ce qui était précieux.
Mais Viola ne pouvait s'empêcher de penser qu'elle ne pourrait y arriver à coup sûr que lorsqu'elle aurait ramené l'homme de fer à ses côtés. Alors, en dépit du fait qu'elle possédait une rancœur immense envers lui, elle faisait tout pour faire ressortir de Garrett l'esprit de l'Aleksander qu'elle avait connu, persuadée qu'une âme aussi forte se terrait forcément quelque part. Ne lui resterait ensuite qu'à conserver son leadership si longtemps souhaité. Elle ne se contenterait pas d'être un des quatre lieutenants comme Andromeda avait accepté de l'être dans le passé, non. Elle voulait être au sommet, aux côtés même de Freya Romanov. Encore une fois, elle n'était pas comme Andromeda : elle n'avait pas côtoyé personnellement cette femme, et bien qu'elle l'estimait profondément par les souvenirs qu'elle avait d'elle, son envie et son avidités naturelles étaient plus fortes que tout. Elle vivait dans un monde de chaos idyllique où elle se croyait au sommet d'une hiérarchie dont personne ne réussissait à la faire ne serait-ce que vaciller. Pour l'instant.