(+) imagine dragons – demons.

« Feysa, nous partons en Angleterre. » La jeune femme lâcha l'assiette qu'elle avait entre les mains laissant la porcelaine se briser en mille morceaux lorsqu'elle heurta le carrelage. Une certaine furie dans les yeux elle se tourne vers son époux. « Pardon? » fit-elle, un sourcil arqué, les bras croisés contre sa poitrine. Ici c'était elle le chef. « J'ai été muté à Londres et j'ai accepté car c'est une excellente opportunité. » Secouant ses boucles brunes, Feysa refusa tout net. « Mais Antalya c'est chez nous. » Kasim poussa un soupir. Il était bien d'accord, mais ne voyait-elle pas l'avenir beaucoup plus brillant qui les attendait en Europe? « On pourra toujours revenir pour la famille, mais je t'assure que non seulement le travail est meilleur, mais en plus je serai beaucoup mieux payé. Et nous serons à Londres bon sang! » Dans un élan de courage, il s'approcha d'elle pour prendre son visage entre ses larges paumes. « Et puis tu t'es toujours plainte que je ne te faisais pas suffisamment voyager.. » lâcha-t-il entre deux sourires. La jeune femme se désinibait peu à peu. « Hmph j'avais quand même quelque chose de moins permanent en tête. » Tous deux se lancèrent un regard entendu et avec pudeur échangèrent un court baiser, bien qu'ils furent seuls dans la cuisine. « Dünya ne va pas beaucoup aimer ça en revanche.. » Ah Dünya. Rien qu'à l'idée de lui annoncer la nouvelle, le visage de Kasim se rembrunit. À tout juste huit ans, la jeune fille n'était pas toujours des plus commodes, c'était le moins que l'on pouvait dire. Terreur de la cour de récréation et déjà pleinement consciente de ses capacités magiques, la contrôler n'était une mince affaire ni pour ses parents ni pour ses professeurs. Lorsqu'elle voulait quelque chose, elle savait l'obtenir par tous les moyens et la crise qu'elle piquerait très certainement lorsqu'on lui annoncerait la nouvelle, ne serait pas belle à voir. Merlin seul savait ce que ses parents devraient lui offrir en échange de ce déménagement. « C'est toi qui lui dis. » Firent-ils d'une même voix avant d'éclater de rire. N'empêche que le problème était toujours là, comment expliquer à Dünya qu'elle allait quitter sa Turquie natale pour de bon sans risquer de déclencher une bombe à retardement dans leur demeure? 



« Je n'aime pas Londres. » lâcha la brunette simplement laissant tomber son sac sur le sol du salon avant d'y envoyer un coup de pied et de le faire valser à l'autre bout de la pièce pour montrer son mécontentement. « Je sais que c'est dur de s'intégrer dans une nouvelle école, surtout dans un nouveau pays, mais tu vas t'y faire tu verras. » Ils avaient tous du s'y faire après tout, il n'y avait de raison qu'elle fasse exception à la règle. Ca faisait quatre ans tout de même, ça en devenait plutôt inquiétant. « Ta gueule. » Le silence choqué qui s'en suivit ne fit pas frissonner une seule seconde la pré-adolescente, qui se tenait prête à soutenir son opinion coûte que coûte. « Surveilles-ton langage Dünya.. » se reprit enfin Feysa, menaçante. Une moue supérieure sur les lèvres, la jeune fille releva le menton toisant sa mère comme s'il s'était agit d'un elfe de maison. « Hmm..Non. » fit Dünya provocante. S'il y avait bien une personne sur qui elle souhaitait passer sa frustration, sa colère ou même ne serait-ce que son ennui de la journée, c'était bien sa génitrice. « Ta gueule. T'en sais rien du tout. Tu vis pas ma vie, tu les connais pas les petits cons qui sont dans mon collège. » Les mains sur les hanches Feysa ne savait ce qu'elle devait réprimander en premier, tant tout, depuis le ton jusqu'à la posture de sa fille était à rectifier d'urgence. « Et n'viens pas me dire qu'il faut que je leur laisse une chance, je m'en fous je veux pas d'eux comme amis. » Immature au possible elle lâcha un dernier « De toute façon les anglais c'est moche. » comme si ça réglait tout avant de rejoindre sa chambre non sans avoir bien évidemment claqué la porte de toutes ses forces. Feysa plantée là par son unique fille enfouit son visage dans ses mains, ne comprenant pas où tout avait bien pu dégénérer. Dünya n'avait jamais été une enfant innocente, mais de là à lui parler ainsi à à peine douze ans… Qu'avait-il bien pu se passer dans sa tête pour qu'elle n'ai semblait-il plus peur d'aucune autorité? Dans sa chambre la brunette vivait bien l'afternath de son emportement, plutôt contente d'elle. Elle n'avait fait que dire la vérité sur les adolescents chauvins et machistes qui formaient à l'entendre la majorité de ses camarades dans l'école publique du sud de Londres où elle avait été envoyée. Autant ils semblaient habitués aux Indiens, autant les Turcs c'était comme s'ils n'en avaient jamais vus et elle avait eu droit à un accueil particulier. De toute façon elle s'en fichait, elle n'avait pas besoin d'eux. S'affalant sur son lit, les yeux fixés sur une tâche au plafond, elle se laissa plutôt entraîner dans le tourbillon de visions étranges qui se faisaient de plus en plus présentes en elle. De visions, ou plutôt de souvenirs. Natalia. Romanov? Non. Elle aurait du. L'injustice de la condition de son autre elle, lui fit crisper le poing sans même qu'elle ne s'en rende compte. Non, elle elle avait été reléguée à un nom de bâtarde, à un village pauvre et à une vie de misère. Sofia en revanche… Elle ferma les paupières tentant de revoir dans son esprit le visage de sa jumelle. C'était étrange, elle qui deux ans plus tôt se considérait comme fille unique. En même temps deux ans plus tôt elle n'avait qu'une identité, qu'une vie. Un sourire étira ses lèvres charnues. Aurait-elle du être effrayée par ses souvenirs? Par les horreurs que son autre elle avait commises et par celle qu'elle avait été prête à commettre. Peut-être. Mais ce n'était pas le cas. C'était presque rassurant tout ça, de se rappeler des ses accomplissements, de ses échecs aussi. Non pas que ce ne fut facile dès le début, mais elle s'était fait à l'idée d'être double. Et quiconque la connaissait aurait pu savoir qu'elle ferait tout pour utiliser cela à son avantage d'une façon ou d'une autre.


Alors qu'elle parcourait les couloirs de pierre du château, elle revoyait les images de Natalia qui en faisait de même, agissant comme espionne sur les ordres sa mère. Sa vraie mère. Pas Feysa la moldue, l'idiote. Non Freya Romanov la grande. Si Natalia avait déjà foulé les dalles de Poudlard, on ne pouvait pas en dire autant de Dünya qui, la boule au ventre, s'avançait pour la première fois de cette vie-ci dans la Grande Salle. La répartition au moins ne sonnerait pas comme du déjà vu, c'était déjà ça. À l'instar de Natalia, Dünya n'avait pas réellement sa place ici. Elle était bulgare, elle était turque, mais elle n'était pas britannique ou irlandaise et son accent lui collait encore à la peau. Il faut dire qu'en débarquant à Londres, elle avait fait exprès de s'y accrocher pour faire chier son monde. Agissant pour une fois docilement elle se rangea avec les autres bien en ligne devant le tabouret et attendit que l'on appelle son nom pour passer sous les Choixpeau, non sans une certaine appréhension. Elle n'avait pas d'attente particulière pour être honnête, elle voulait juste en finir et vite, pour pouvoir retourner à son activité précédente: observer les minois des autres élèves à la recherche de têtes connues. Enfin connues.. connues par Natalia. Déjà alors qu'elle venait de poser son joli petit derrière dans la barque qui l'avait menée à l'école elle avait repéré des visages familiers et avait su remettre un nom sur chacun de ceux qui l'avaient interpellés. Extrêmement curieuse, elle ne pouvait s'empêcher de se demander s'ils en faisaient autant, s'ils avaient reconnu et surtout s'ils avaient changé. Quoique ce n'était pas si important à vrai dire. Lorsqu'elle avait reconnu le visage de Sofia elle avait su immédiatement que peu importe la personnalité ou l'histoire de son ancienne jumelle aujourd'hui, elle lui ferait payer cher pour son autre vie. D'aucuns auraient pu dire que c'était injuste car non seulement Cordélia – car c'était son nom, elle s'était donné dans le train pour objectif de le connaître – ne lui avait rien fait, mais on pouvait aussi remettre en question une quelconque responsabilité de Sofia pour ce qui était arrivée à Natalia. Dünya ne voyait toutefois pas du tout les choses sous cet angle-là. Sofia avait eut tout ce que Natalia n'avait pas pu avoir, tout ce qu'elle n'avait pas pu avoir puisqu'elles étaient la même personne. Même si elle avait appris à faire avec les souvenirs de son ancienne vie, fait avec comme une présence de Natalia en elle, ce n'était pas toujours si évident que ça. Avec la connaissance venait des choix qu'elles avaient du prendre et ayant choisi de poursuivre les objectifs de Natalia forcément elle avait plus tendance à confondre sa vie actuelle et son ancienne vie. « Dünya Leyhan. » appela-t-on enfin, la tirant ainsi de sa rêverie. Elle avait réfléchi et toutes choses considérées, Natalia aurait probablement été une Serpentard. Qu'en était-il d'elle? « Oh! intéressant… un caractère déterminé et ambitieux, tu sais ce que tu veux et tu es prête à te donner les moyens d'aboutir à tes fins. Tu aurais tout à fait ta place chez les Serpents…Néanmoins tu es impérieuse, courageuse et tu ne manques pas de cran ce qui serait très apprécié chez les braves Gryffons. Oui, je crois que tu serais parfaite pour GRYFFONDOR. » Le dernier mot prononcé à l'intention de toute la salle, la fit sursauter. Elle esquissa néanmoins un sourire, pas si faux que ça, plutôt contente d'avoir échappé à une répartition qui aurait pu, à en croire les préjugés sur les maisons qu'elle avait pu entendre dans les barques qui les avaient menées au château, en dévoiler trop sur sa vraie nature. Ne pouvant retenir un regard supérieur à l'intention de Cordélia qui devait justement passer après elle, l'adolescente rejoignis la table de sa nouvelle maison, les germes d'un plan commençant à se former dans son esprit en ébullition. Et pourquoi pas se servir de cette répartition, pourquoi ne pas jouer à la gentille et parfaite Gryffondor et demeurer insoupçonnable quant à ses réelles intention? Bonne actrice, elle avait les moyens de jouer le jeu. Lorsque Cordélia fut sous ses yeux envoyées à Serpentard son choix était fait. Pourquoi ne pas la laisser jouer le vilain petit canard un moment, pendant qu'elle-même aurait droit à une reconnaissance qui, si elle n'était fondée que sur des artifices était au moins plus réelle que celle qu'elle n'avait jamais pu obtenir en tant que Natalia.


Tu trottines gaiement à deux doigts te mettre à danser. Tu pourrais après tout, qui pourrait dire quoique ce soit après tout tu n'es pas toi, tu es elle. Ta jumelle exécrée, Sofia à qui te vient de gâcher la vie à jamais. Ton plan n'aurait su mieux se dérouler que cela. Non contente d'avoir il y a quelque temps de ça prévenu l'évasion de son amie Ros et d'avoir tué l'un des meilleurs amis du fiancé de Sofia le jour de son mariage, tu as désormais mis définitivement fin à ses rêves de bonheurs auprès de son ancien fiancé visiblement encore amoureux. Sous son apparence tu l'as attiré dans tes filets et sans la moindre hésitation tu l'as poignardé. Les choses ne pourraient pas se dérouler mieux que ça. Fidèle lieutenant de celle que tu as découvert être ta mère dans cette guerre qui déchire le monde, tu ne souhaiterais être nul part ailleurs à l'heure qu'il est. Entre les informations que tu as pu lui fournir à force d'espionner à Poudlard et ailleurs et ta loyauté à son égard elle est forcément fière de toi. Un jour elle te reconnaîtra. De toute façon elle n'a que toi puisque l'autre n'est qu'une traitresse. Un jour, elle verra que tu vaux bien mieux que Sofia. À cette pensée tu t'arrêtes, brusquement dégoûtée par l'enveloppe corporelle qui t'enrobe en ce moment. Tu préférerais récupérer la tienne et plus vite que ça, l'effet du Polynectar te semble s'éterniser et ça t'agaces profondément. Tu poursuis néanmoins ton chemin, un sourire fier aux lèvres prête à étaler ta victoire à qui voudra l'entendre. Une magnifique victoire à tes yeux, bien que n'ayant que si peu de valeur réelle pour la guerre. Tu serais même capable de payer une ronde à quiconque croisera ton chemin pour la célébrer. Mais d'abord il faut que tu récupères ton apparence, tu ne peux pas retrouver le champ de bataille avec la corps de ta jumelle. Sauf que c'est sans compter la sorcière que tu rencontres quelques minutes seulement avant que l'effet de ta potion ne se dissipe. Sans compter sur ses réflexes, sur le fait qu'elle a déjà vu ta sœur, qu'elle pense la reconnaître. Sans compter sur le fait qu'elle maîtrise parfaitement le sortilège de mort. Tu n'as même pas le temps d'étouffer un juron que c'est fini.